Microsoft et Google vous font avaler l’IA (et vous la font payer)

L’utilisation de Microsoft Copilot et de Google Gemini n’est plus facultative, mais obligatoire. Il s’agit soi-disant de rendre l’IA plus accessible, mais en pratique, c’est une excuse pour augmenter les taux d’utilisation et les revenus.

Vous n’utilisez pas encore Copilot ou Gemini ? Alors Microsoft et Google feront en sorte que vous ne puissiez plus ignorer leurs assistants d’intelligence artificielle à partir de maintenant. Les géants de la technologie ont récemment annoncé que les fonctions d’IA étaient désormais « incluses » dans leurs abonnements 365 et Workspace. En échange de plus d’IA, le prix de l’abonnement augmente. Le fait que les utilisateurs n’aient pas du tout demandé cela n’est qu’un pis-aller.

De l’opt-in à l’opt-out

Jusqu’à récemment, toute personne souhaitant utiliser Copilot ou Gemini devait prendre un supplément en plus de l’abonnement. Pour être clair, nous parlons ici des versions professionnelles des modèles, avec plus de capacité, de fonctionnalité et de sécurité. À plus de 20 euros par mois, le coût supplémentaire était certes élevé, mais l’utilisateur avait au moins le choix d’y souscrire ou non.

Microsoft et Google ont estimé que l’adoption de Copilot et de Gemini était trop lente de ce point de vue. Les assistants d’intelligence artificielle ont déjà été intégrés dans les applications bureautiques de nombreuses manières. Microsoft 365 a même subi un changement de forme pour mettre en évidence la présence de Copilot. Cela s’est avéré insuffisant, et c’est pourquoi Google et Microsoft adoptent une approche agressive. Cerise sur le gâteau de l’IA, ils font en sorte qu’il soit le plus difficile possible pour les utilisateurs de souscrire à un autre abonnement « muet ».

Si Microsoft et Google sont aujourd’hui explicitement pointés du doigt, Apple peut tout aussi bien faire pénitence. Désormais, Apple Intelligence (disponible dans l’UE après une longue bataille) est activé par défaut dans iOS et macOS. Certes, vous pouvez la désactiver et vous ne devez pas payer d’abonnement pour cela, mais le principe reste le même. Apple n’a pas demandé aux utilisateurs s’ils le souhaitaient et vous devez chercher vous-même le bouton marche/arrêt dans les paramètres.

Coûts élevés, investisseurs impatients, utilisateurs mécontents

Ne pensez pas que Microsoft et Google ajoutent l’IA à votre abonnement pour améliorer votre vie. Ils veulent simplement sauver leur peau. L’entraînement et l’inférence des modèles ont coûté des millions de dollars et, à l’heure actuelle, Google et Microsoft sont déficitaires. Au bout du compte, c’est l’utilisateur qui devra payer la facture.

Les géants de la tech doivent aussi penser à leurs investisseurs. Ceux-ci ont été abreuvés de belles promesses sur l’IA depuis deux ans, mais le moindre doute suffit à faire éclater la bulle. L’ajout de Gemini et de Copilot à tous les abonnements augmentera artificiellement les chiffres d’utilisation d’un seul coup et assurera une source de revenus plus stable. C’est exactement ce que les investisseurs veulent entendre.

Les utilisateurs sont moins satisfaits. En Australie, qui a été le premier marché à être exploité, l’ajout obligatoire de Copilot causait déjà beaucoup de frustration. Copilot demande à chaque opération s’il peut rendre service. Les souvenirs désagréables de l’époque de Clippy reviennent à la surface. Même les utilisateurs de smartphones équipés de Gemini remarqueront qu’il agit avec beaucoup plus d’assurance que l’ancien assistant. L’intelligence artificielle ressemble donc davantage à une intrusion artificielle.

Faire avaler l’IA aux utilisateurs ne fera que les saturer plus rapidement.

Quelles règles ?

Microsoft s’attaque également aux règles de l’UE en matière de concurrence loyale. Rappelez-vous quand Microsoft a dû supprimer Teams d’Office en 2023 parce que ce lien représentait une concurrence déloyale pour les autres plateformes de communication. Microsoft veut peut-être nous faire croire qu’Office et Copilot sont une seule et même chose, mais elle sait très bien qu’il s’agit d’une erreur. Elle impose Copilot aux utilisateurs pour lui donner un avantage artificiel sur les autres applications d’IA, qu’elles soient meilleures ou non.

Ce que Microsoft fait avec Windows, Google et Apple le font tout aussi bien avec leurs plateformes mobiles. Android a peut-être la réputation d’être un « écosystème ouvert », mais chaque téléphone Android est invariablement livré avec un pack Google. Cela a certainement donné au moteur de recherche et au navigateur Chrome un avantage significatif, car cela réduit le besoin d’une alternative. Google joue maintenant à cache-cache avec les fabricants de smartphones pour vanter les mérites de Gemini en suivant la même logique. Pourquoi installer l’application ChatGPT si vous avez déjà Gemini ?

Pensez à la façon dont Apple a, pendant des années, fermé son écosystème iOS aux fournisseurs tiers. Apple a délibérément fait en sorte qu’il soit difficile pour les utilisateurs de trouver des alternatives à ses propres applications. Sous la pression de la DMA, Apple a (à contrecœur) ouvert les portes, mais au départ, elle ne voulait pas introduire l’intelligence en Europe parce qu’elle n’était pas autorisée à le faire en vertu de ses propres règles.

Les entreprises technologiques savent que le temps est leur ami. La bureaucratie est toujours en retard sur les développements technologiques. Le temps que la législation entre en vigueur, qu’une infraction soit établie et qu’une sanction puisse être imposée, la concurrence a déjà disparu depuis longtemps. Risquer des amendes éventuelles et corriger après coup est plus rentable que d’attendre que les règles du jeu soient déterminées.

Le client n’est plus roi

N’ayez donc pas l’illusion que votre avis compte en tant que client. Dans le monde de l’informatique, les géants de la technologie sont rois. La façon dont Microsoft met en avant le nouvel Outlook prouve une fois de plus qu’il fait ce qu’il veut. Les utilisateurs n’ont plus qu’à l’accepter ou à chercher des échappatoires créatives pour se soustraire à la volonté de Microsoft.

En conclusion, il ne s’agit pas d’un argument contre l’IA. Les fonctions d’IA apportées par Copilot, Gemini, ChatGPT et autres peuvent en effet ajouter de la valeur à notre vie quotidienne. Mais laissons aux utilisateurs le choix de les utiliser ou non et de quelle manière.