Vance : « Les États-Unis sont le leader ultime de l’IA, l’UE pourrait être à portée de main si elle déréglemente ».

Vance : « Les États-Unis sont le leader ultime de l’IA, l’UE pourrait être à portée de main si elle déréglemente ».

Le vice-président américain Vance a profité de son passage au sommet de l’action sur l’IA à Paris pour présenter les États-Unis comme le leader ultime dans ce domaine. Ceux qui veulent suivre sont autorisés, et ceux qui veulent réglementer doivent en assumer les conséquences.

Le vice-président américain JD Vance, lors du sommet de l’action sur l’IA à Paris, a présenté son pays comme un leader agressif qui veut à tout prix dominer le domaine de l’IA. La réglementation n’a pas sa place dans cette vision. L’UE reçoit un avertissement : elle est invitée à suivre les États-Unis en tant que partenaire de second ordre, ou peut se ranger du côté des régimes totalitaires.

« L’administration Trump veillera à ce que les systèmes d’IA les plus puissants soient construits aux États-Unis », a-t-il déclaré. « Avec des conceptions et des puces américaines ». Vance faisait référence au projet Stargate, dans lequel les États-Unis veulent investir 500 milliards de dollars dans le développement de l’IA.

Main avec laisse

« Ce n’est pas parce que nous sommes le leader que nous devons tout faire seuls », a ajouté M. Vance. Cette déclaration semblait être une sorte de main tendue, même si elle cachait une laisse : si l’UE veut rejoindre les États-Unis, elle doit aussi les écouter.

La réglementation fait la une des journaux. M. Vance et les États-Unis souhaitent qu’elle soit supprimée à grande échelle. La désinformation n’existe pas, selon M. Vance, même si l’absence de réglementation dans son pays permet à des puissances étrangères comme la Russie de diffuser leur propagande sans problème.

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L’IA sûre ou éthique est également hors de question pour M. Vance et l’administration Trump, ce qui implique que l’UE ne devrait pas non plus défendre ces valeurs. « L’avenir de l’IA ne sera pas gagné par des palabres sur la sécurité », affirme-t-il. M. Vance ajoute littéralement que le défi de l’IA ne doit pas être abordé avec une conscience de soi ou une aversion pour le risque.

Gagnants et perdants

Depuis le premier mandat du magnat de l’immobilier, Trump et son entourage ont choisi de considérer toutes les politiques dans un contexte de somme nulle, où gagner implique toujours que quelqu’un d’autre perde ou vice versa. La coopération constructive, où un plus un deviennent trois, est hors de question. Les États-Unis doivent gagner, ce qui implique que les autres doivent perdre, quelles que soient les conséquences.

L’avenir de l’IA ne passera pas par des palabres sur la sécurité

JD Vance, vice-président pour les États-Unis

Vance prévient que les puissances étrangères utilisent l’IA comme une arme pour réécrire l’histoire, espionner les gens et censurer la liberté d’expression. Il s’agit d’une référence claire de la Chine qui comporte néanmoins une certaine ironie : après tout, les États-Unis s’engagent sur une voie similaire sous Trump.

En outre, le président s’emploie activement à mettre en place des mécanismes pour armer les États-Unis contre les campagnes de désinformation menées par ces puissances étrangères. Une conclusion logique pourrait être qu’une réglementation est nécessaire pour empêcher l’utilisation de l’IA à des fins malveillantes, mais M. Vance lui-même ne partage pas cette idée et n’a proposé aucune autre solution.

Salve d’ouverture vers les DMA et DSA

Bien que M. Vance se soit concentré sur l’IA dans son discours, il n’est pas difficile d’y voir un coup de semonce de la part de l’UE sur d’autres réglementations. En réponse à l’absence totale de cadre réglementaire aux États-Unis, l’Union européenne a élaboré ses propres règles. Prenons par exemple la loi sur les services numériques (DSA) et la loi sur les marchés numériques (DMA). La DSA et la DMA imposent des responsabilités aux grandes entreprises (qui sont donc essentiellement américaines). Celles-ci ne doivent pas abuser de leur position de monopole et doivent veiller à ce que leurs plateformes ne deviennent pas des porte-voix pour les « fake news » et la propagande déstabilisatrice.

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La loi sur l’IA, mais aussi la DSA et la DMA sont une épine dans le pied de Trump et Vance. Les grands milliardaires de la technologie, dont Mark Zuckerberg de Meta et Elon Musk de X, ne veulent absolument pas se conformer aux règles européennes. Ils ont acheté l’oreille de Trump en lui versant d’importantes contributions et ont gagné son cœur en abandonnant les programmes de diversité dans leurs propres entreprises. Il n’est donc pas surprenant que le gouvernement américain vienne maintenant combattre l’UE au nom des géants de la technologie.

Attitude dominante

En tout cas, le passage de Vance au AI Action Summit ne passe pas inaperçu. Vance se montre le porte-parole d’un gouvernement américain qui se met en avant, sans aucune place pour l’introspection. Il n’existe pas de partenaires égaux, seulement des suiveurs. Les États-Unis doivent gagner à tout prix dans un concours convoqué par Trump lui-même, et les valeurs européennes telles que la sécurité, la diversité et l’accessibilité s’y opposent.

Après son discours, Vance a perdu le sommet. Les réponses ou les points de vue des dirigeants européens et asiatiques ne l’intéressaient pas.

Consciente de son retard, l’UE veut le combler sans renoncer à ses propres valeurs. Telle est du moins l’ambition. Un investissement supplémentaire de 200 milliards d’euros devrait y contribuer. L’UE veut développer l’IA ouverte de manière responsable : un projet qui n’est guère soutenu par les États-Unis.